Motorisation automobile, la guerre technologique ne fait que commencer !

Article initialement publié le 22 Février 2006 sur le site de l’ADMEO

Malgré sa vitalité, les perspectives d’avenir du diesel ne cessent de s’assombrir. Comme nous l’avons déjà souligné^[1], les limites auxquelles il se heurte en terme de pollution et de consommation pourraient conduire les constructeurs à sérieusement envisager de miser sur des technologies alternatives. Dans ce domaine, la première qui vient naturellement à l’esprit est la technologie commercialisée principalement par Toyota (et de manière plus marginale par Honda) : le moteur Hybrid essence électricité, qui allie un moteur à explosion essence avec un moteur électrique pouvant fonctionner alternativement ou simultanément selon les besoins. PSA, notamment par la voix de son PDG J. M. Folz, a souvent exprimé sa désapprobation envers ces véhicules soulignant que leurs apports, en comparaison du diesel, étaient faibles voire inférieurs pour de petites cylindrées. Cependant, nous pourrions alors répondre au constructeur français que les améliorations réalisées entre les deux générations de Prius, modèle hybride essence de Toyota, laissent supposer qu’il existe une importante marge de progrès. Toyota prétend d’ailleurs être en mesure d’améliorer de manière substantielle son hybride.

L’autre issue est tout simplement de réinvestir massivement dans les moteurs essence. Ces derniers ont aussi leur avantage : ils rejettent peu de polluants qui sont de surcroît facilement éliminés avec un pot catalytique. La véritable contrainte est leur surconsommation qui les conduit à rejeter une quantité élevée de CO2. Cependant, une nouvelle génération de moteurs essences turbocompressés à injection directe pourrait permettre de contourner ce problème. Le plus prometteur dans le domaine^[2] est le 1,4 litre TSI de Volkswagen qui, fort de ses 170 chevaux, aurait, selon VW, une consommation (7,2L/100 Km) équivalente à un moteur essence 1,6 l de 102 chevaux et consommerait dans ses déclinaisons les moins puissantes autant qu’un moteur diesel.

Face à de tels progrès, on pourrait douter de la pérennité des technologies diesel, mais ce serait sans compter sur la pugnacité de PSA. Si la technologie diesel disparaît, cela pourrait être au profit de la technologie Hybride……. diesel ! En effet, le champion du diesel n’abandonnera pas la technologie et le savoir-faire qui font sa réputation et son succès depuis des décennies ! D’ailleurs, mardi 31 janvier 2006, PSA a présenté deux prototypes, une Peugeot 307 et une Citroën C4, toutes deux équipées d’un moteur 1,6 HDI couplé à un moteur électrique. Cette technologie permet d’améliorer de 30% sa consommation par rapport à un moteur diesel classique et de 25% par rapport à un véhicule hybride essence.

Cependant, les prestations du véhicule ne font pas oublier le véritable défi du constructeur : son industrialisation. Pour être commercialement viable, le coût de production doit pouvoir être divisé par trois, l’objectif selon J. M. Folz étant d’arriver à un écart entre l’hybride diesel et le diesel classique du même ordre que celui existant entre le diesel et l’essence. Dans cette perspective, le constructeur n’envisage pas de mettre sur le marché un tel véhicule avant 2010. Ce dernier espère en effet, avec l’aide de ses équipementiers et de l’Agence de l’innovation industrielle, pourvoir aboutir, à la fin de ces quatre années, à un prix acceptable pour le consommateur.

Pour le moment, Toyota peut être serein, il lui reste quatre ans pour atteindre son objectif, écouler un million de véhicules à moteur hybride essence dans le monde, mais également pour faire progresser sa technologie. Cependant, si PSA arrive au bout de ce défi, qu’il considère comme la plus grande révolution depuis l’injection directe pour moteur diesel^[3], les prestations offertes, mais également, l’attachement des européens pour le diesel pourraient lui permettre de réaliser un véritable hold-up commercial.

L’industrie automobile se retrouve donc dans une situation inédite depuis le début de l’automobile^[4], plusieurs technologies cohabitent et l’incertitude sur leur perspective est totale. D’autant plus que le moteur à hydrogène pourrait également venir bousculer la donne. En effet, même si les spécialistes restent sceptiques sur son développement à court et moyen terme, GM s’est dit en mesure de mettre sur le marché de tels véhicules dès 2010.

[1] Le diesel, le début du déclin ? Edouard Barreiro Newsletter de l’ADMEO n°15.

[2] Paradoxalement, PSA, champion du diesel, fait partie des promoteurs de cette technologie avec l’adoption du nouveau moteur 1.6L issu de sa coopération avec BMW. Ce dernier s’est chargé de la conception et PSA se charge de la production.

[3] DIXIT, J. M. Foltz, le monde.fr, (1/02/2006). Pour plus de renseignements sur la « révolution » de l’injection direct diesel, voir également : « Coordination des activités innovantes et transformation de l’industrie automobile : le cas du common rail », Edouard Barreiro.

[4] Au début de l’histoire automobile plusieurs carburants ont cohabité avec l’électricité et la vapeur.